Retour sur un voyage riche en émotions pour moi… Mama Africa, tu m’accueilles à nouveau, plus de 30 ans après ma première grande aventure au Gabon alors que je n’étais pas plus haut que trois pommes… Un mois passé en Afrique Noire au début des années 80 pour rendre visite à mon oncle qui construisait alors le Trans-Gabonais reliant Libreville à Franceville. Les nombreux clichés de ce séjour me font toujours rêver et je repense aux anecdotes croustillantes que me racontent ma mère, mon oncle ou ma tante.
« Tu te rappelles quand tu voulais manger des frites à 3h du matin… Hum c’est beuhh »
ou encore
« Tu as failli y rester lorsque tu jouais avec le boa constrictor dans le jardin »,
petit spécimen que ma mère a coupé en deux à la machette pour protéger sa progéniture alors qu’elle tremble en voyant un cafard !
Du Gabon à la Côte d’Ivoire il n’y a qu’un pas ? Pas sûr, déjà le Gabon est situé bien plus au Sud et fait partie de ce qu’appelait alors la France : Afrique Équatoriale Française (AEF). La Côte d’Ivoire, quant à elle faisait partie de l’Afrique Occidentale Française (AOF). Deux grandes provinces africaines aux cultures & climats très différents mais tous deux sous l’emprise de la France impérialiste : terres d’aventures & velléités expansionnistes, esclavage & développement économique… Triste et dur héritage mais au final que cette Terre est belle.
La Côte d’Ivoire pour l’esprit du Français c’est quoi ? L’un des plus riches pays d’Afrique de l’Ouest, la culture du cacao, l’héritage Houphouet-Boingy, les Éléphants à l’origine du nom du pays, le Mapouka et l’heure de gloire de Magic System ou encore l’artisanat avec les masques & statuettes sculptés dans des bois sombres, la cohabitation pacifique de l’Islam du Christianisme et autres Animistes et croyances ancestrales.
La Côte d’Ivoire est plurielle, tropicale et humide au Sud le long de la côte Atlantique et désertique au Nord à la frontière Burkinabé et Malienne. Le brassage ethnique est important avec les Akans, les Baoulés, les Dioula, les Sénoufous, Malinké, Mandés sans parler des expats européens et de la grosse communauté libanaise très impliquée dans le commerce… Chacun ayant son dialecte, la langue nationale est le Français, il a d’ailleurs évolué et l’argot ivoirien, le langage de la rue, c’est le Nouchi !
« On dit quoi ? »
C’est parti, je vais rejoindre la Côte d’Ivoire et mon parrain, qui a sillonné l’Afrique et est tombé amoureux de ce Pays, où il vit depuis longtemps maintenant. Son séjour africain avec mon oncle n’y est sûrement pas étranger ! Passionné d’Histoire et de Culture, je sais déjà que je découvrirai la Côte d’Ivoire comme peu de personnes en ont la chance. Je dédie cet article à mon parrain et mon oncle les deux baroudeurs africains de la famille !
Abidjan, terre des lagunes
Arrivé en fanfare à Abidjan accueilli par mon parrain et un de ses amis répondant au doux nom de Cobra ! Ils bossent tous les deux dans la même boîte de sécurité et vont nous faire découvrir l’accueil ivoirien ! C’est parti pour la tournée des bars avant celle des boîtes d’Abidjan by night ! Le ton est donné. Repos bien mérité alors qu’on a toujours pas défait nos valises. Le jour se lève et nous reprenons quelques forces avant de découvrir la capitale de jour.
Abidjan, terre des lagunes, capitale économique de Côte d’Ivoire et ses presque 5 millions d’âmes répartis dans ses différents quartiers Abobo & Yopougon, quartiers populaires, Plateau le quartier des gratte-ciels, Cocody celui des belles villas, Koumassi, Treichville et Marcory déployés autour de la lagune Ebrié reliés par trois ponts.
Abidjan est vaste et la circulation problématiques en journée. Il fait chaud et ce qui nous frappe rapidement c’est ce ciel grisâtre. Il ne s’agit pas de nuages humides mais de nuages de poussière amené par l’Harmattan, un vent chaud en provenance du Sahara. Habituellement l’Harmattan ne souffle plus en cette période mais les dérèglements climatiques sévissent aussi ici.
On visitera la Cathédrale Saint-Paul d’Abidjan et sa forme si particulière construite par Houphouët-Boigny dans les années 80, avec sa croix monumentale et ses magnifiques vitraux décrivant la colonisation. On aura l’occasion de visiter le marché de Marcory loin des sentiers battus, un marché d’Abidjan aux couleurs et odeurs qui ne peuvent laisser insensibles. On profitera de la vue sur le Plateau depuis l’hôtel Ivoire et ses 25 étages ! On ira flâner et faire quelques emplettes au CAVA, le Centre d’Artisanat de la Ville d’Abidjan qui vaut vraiment le détour. Le soir venu un bon repas dans un des maquis de la Capitale pour se délecter d’Attieké, d’Alloco, de Kedjenou de poulets ! Une vraie surprise pour moi qui n’avait jusque là apprécié que moyennement la cuisine africaine et ce que j’en connaissais. Le goût était fin et savoureux.
Grand-Lahoux, entre pêche et farniente
Après quelques jours passés dans la cohue de la Capitale ivoirienne, mon parrain nous a concocté un petit week-end au calme chez un ami à lui qui tient un campement de pêche, le Cap Lahou dans la commune de Grand-Lahou, village de pêcheurs situé à environ deux heures de route à l’Ouest d’Abidjan .
Au programme : Balade en bateau, initiation à la pêche au gros et farniente ! Un week-end de rêve nous attend.
La route côtière en bon état jusqu’à Grand-Lahou nous offre des paysages assez changeants. On sera frappé par les plantations d’hévéas et de palmiers à huile, cultures extensives qui ont du grandement défiguré la région. Une fois sorti de voiture, on embarque sur des pirogues pour traverser la lagune et rejoindre le campement. Le ciel est toujours couvert, Harmattan et tempête de sable sahariennes oblige, mais il fait bien lourd et le soleil tente de percer.
Un premier contact avec l’Océan Atlantique nous fait vite comprendre que la baignade sera compliquée en dehors de la lagune et des passes (lieu de rencontre de l’Océan et de la lagune). Les vagues et rouleaux qu’on peut observer produisent un bruit sourd et même en étant bon nageur, prendre un bain ici parait périlleux voir suicidaire ! Allez hop, on pique une tête de l’autre côté dans la tranquille lagune. Haaaa ! Là on est au max.
Pour les repas, poissons frais et langoustes accompagnés d’Attieké, de riz et d’Aloko. Décidément on est séduit, on mange comme des rois. Une balade en bateau nous permet de découvrir les pêcheurs au filet ou en pirogue, les oiseaux qui peuplent la lagune… Il y a de la vie, le coin est magnifique. On fera une halte rafraîchissements dans un petit bar de brousse dénommé le Marseillais. Le patron très sympathique et accueillant nous expliquera pour la petite histoire que son bar s’appelait d’abord le Parisien mais qu’un Marseillais établi dans le secteur l’a convaincu de rebaptiser son bistro Le Marseillais, en hommage à la plus belle ville de France haha.
Le lendemain, journée initiation à la pêche au gros. Le concept est simple, le bateau vogue et des cannes à pêche sont en place à l’arrière du bateau en attendant qu’un poisson morde à l’hameçon. Je m’y essaie dès que le coéquipier m’indique qu’il y a une touche. Il m’explique comment procéder pour remonter la prise et je m’exécute. Quelques minutes après, on sort un beau spécimen de barracuda. Il est impressionnant, sa tête est juste horrible ! Et dire que je me suis baigné dans la lagune la veille. Brrrr… Cela dit, ça reste une super expérience et je suis assez fier de cette prise même s’il faut l’avouer, je n’ai que peu de mérite ! Cette partie de pêche nous aura aussi permis de découvrir une forêt dense et des arbres gigantesques, notamment des frangipaniers qui forcent le respect. Les colons français venaient chercher les essences de bois rares sur toute la côte avant de les expédier en Europe. Une véritable industrie qui a également saccagé les forêts et dont on peut voir les stigmates encore aujourd’hui.
Grand Bassam, ancienne capitale coloniale au charme désuet
C’est parti pour une excursion d’une journée au départ d’Abidjan où nous pourrons découvrir la désormais tristement célèbre ville côtière de Grand Bassam. En effet, elle sera le siège d’un attentat terroriste quelques semaines après notre départ.
Grand Bassam est surtout connue pour avoir été la première capitale du Pays à l’époque de la colonisation. Elle présente un patrimoine architectural de premier plan et fait l’objet d’une demande de classement au Patrimoine mondial de l’Unesco. Une fois arrivé sur place, on prend attache avec l’Office de tourisme qui nous propose une visite du Royaume de Moossou et de l’ancienne ville coloniale.
On aura ainsi le privilège de pénétrer dans l’enceinte du Palais du Roi Moossou, où nous seront reçu par son attaché qui nous expliquera l’origine du royaume et les coutumes locales. Ça me fait pensé l’espace d’un instant à la comédie des années 80 un prince à New-York avec Eddy Murphy, mais là c’est la réalité. Les parures & tenues du roi sont pour le moins clinquantes.
En route vers le centre historique où on visitera les principaux bâtiments en compagnie de jeunes de la ville qui étaient heureux de nous faire découvrir ces anciens fleurons de l’époque coloniale. En fait, Grand Bassam n’est pas resté très longtemps la capitale du pays. La fièvre jaune y sévissait âprement et a conduit les colons français à rentrer plus dans les terres pour finir à Abidjan, qui connaitra alors un essor important.
Quoi qu’il en soit, il règne une atmosphère très particulière dans cette petite ville côtière chargée d’Histoire. Un must à faire en Côte d’Ivoire selon moi. Espérons qu’un vaste projet de protection et de valorisation sera mis en place dans les années à venir.
Yamoussoukro, la petite capitale d’Houphouet-Bouani
A nouveau sur la route en direction du Nord, vers Yamoussoukro, le village d’Houphouët-Boigny devenue capitale ivoirienne. Ça semble étrange de se dire lorsqu’on arrive ici que nous sommes dans une capitale. Yamoussoukro est vraiment une petite bourgade comparée à la mégalopole que constitue Abidjan !
Mais elle n’en reste pas moins sans intérêt ! D’abord, on s’enfonce un peu plus dans le pays et là le climat et la végétation sont bien plus sec ! Enfin, la ville présente deux pépites : une basilique majestueuse et une mosquée pleine de charme.
On commencera par l’imposante Basilique Notre-Dame de la Paix, plus haute que celle de Rome ! Vaste chantier achevé à la fin des années 80. On ne connaitra jamais le prix de cette réalisation titanesque, symbole de la puissance du pouvoir en place. L’intérieur est aussi impressionnant que l’extérieur avec ses vitraux aux couleurs chatoyantes apportant un peu de poésie au bâtiment.
La Mosquée de la Paix mérite aussi une visite. Le calme y règne également et son architecture caractéristique d’Afrique de l’Ouest ne ressemble à aucune mosquée que j’ai pu voir jusqu’à présent.
Assinie-Mafia, le Saint-Tropez ivoirien
Dernier week-end avant notre retour sur le vieux Continent. Mon parrain s’est arrangé pour que nous séjournions deux jours à Assinie-Mafia dans la résidence secondaire d’un de ses amis.
Assinie-Mafia est une station balnéaire huppée, très prisée par les riches Ivoiriens pour s’y reposer et profiter de leurs vacances et week-ends. Assinie-Mafia est légèrement plus éloignée que Grand-Bassam, à proximité directe du Ghana. La ville est célèbre car Alpha Blondy, roi ivoirien du reggae en parle dans ses chansons et que le Club Méditerranée y était établi et fut le lieu de tournage du film culte français d’un autre âge : Les Bronzés.
Ce week-end sera vraiment particulièrement reposant (hormis la balade en quad sur la plage plutôt sportive). En effet, nous serons privés d’électricité et nous apprécierons le rythme du coucher et du lever du soleil dans un endroit paradisiaque coupé du monde moderne !
En définitive, c’est le cœur lourd que nous sommes repartis à l’aéroport direction l’Europe. On a tissé des liens fort avec quelques personnes et nous gardons contacts encore aujourd’hui. J’ai aussi appris à connaître un peu plus mon parrain et je comprend son amour pour ce beau pays. 10 jours c’est court mais le programme était intense et riche !
C’est l’heure de s’enregistrer au comptoir Air France, et là grosse surprise : l’employé ne nous trouve pas dans son listing pour l’embarquement. En fait, on s’est trompé de jour. On est venu un jour trop tôt. On aura donc un jour de rabe au pays des Éléphants !